Je voudrais te dire...mais comment te le dire ?
Je cherche en vain les mots, je cisèle des phrases vides et creuses.
Mais alors comment te dire que je t'aime ?
Tu connais tout de moi, le moindre mot, le moindre geste, la moindre attitude, sont décodés avant que je n'ouvre la bouche. Tu penses ce que je pense, tu aimes ce que j'aime, et bien souvent tu emploies le pronom "Nous" pour donner un avis ou prendre une décision.
Déclarer son amour c'est autre chose que de dire banalement
"Je t'aime"
Je t'aime, je t'aime... et alors c'est tout ?
Il doit y avoir des mots pour ça, des envolées lyriques, des formules magiques !
Je me souviens de notre première rencontre :
Tu étais blonde, fine et souple comme un roseau. Ta peau d'une blancheur extrême, soulignait la pulpe de tes lèvres et l'éclat de ton visage à l'ovale parfait.
Je suis immédiatement tombé en amour comme disent nos cousins québécois !
Nous étions adolescents, innocents et romantiques,
Il y a si longtemps, si longtemps déja !
J'étais un garçon instinctif, réactif, passionné, alors devant cette nature à façonner, tu as décidé de tout enseigner : la patience, la réflexion, la modération, le silence parfois.
Bon élève, j'ai tout appris de toi : la magie d'un matin, le concert de la pluie sur le toit qui résonne, la musique du vent, le vol de l'hirondelle, et le bonheur de vivre chaque instant, chaque seconde à tes côtés.
Le temps, l'implacable machine à détruire les corps, est passé sur nous comme il passe sur chaque atome de matière. Il nous a érodés, plissés, vieillis, il nous a volé cette jeunesse que d'aucuns pensent éternelle.
Cependant, aujourd'hui encore, les seules images qui puissent faire tressaillir mon vieux coeur sont à la fois, le regard débordant d'amour que tu poses sur moi, la douceur de ta main cherchant la mienne, et la tendresse du baiser que tu me donnes à l'aube de chaque matin.
Je sais qu'un jour viendra où la Camarde nous fera signe, c'est le destin de tout ce qui vit sur notre Terre.
Alors si la terrible faucheuse me tend la main en premier, je sais que je guetterai impatiemment dans l'ailleurs l'instant où tu me reviendras.
Si elle passe son chemin et t'invite la première à l'accompagner, sache que le reste de ma vie sur Terre ne sera qu'une longue et éprouvante attente.
Shangaan