Un petit poème va bientôt mourir
A peine posté sur ce joli site
Il paraît pour émouvoir ou divertir
Il brille de mille feux, c'est une réussite
Ou agonise dans l'indifférence des regards sourds
Trop faible, trop court, trop maigre pour toucher
Il se prépare à disparaître pour toujours
Plus vite que les autres qui savent aguicher
...
Viennent les commentaires, en une ronde enjouée
Qui disputent le dithyrambe à l'amitié
Parfois cruels, parfois blessants
Souvent justes, et puis rassurants
L'auteur s'en flatte, il les goûte de ses yeux gourmandise
S'en délecte, s'en ravit les déguste, friandises
Pour d'autres rien ne vient que le silence
Sentence d'une audience qui l'assassine d'indifférence
...
Un petit poème va bientôt mourir
A peine posté sur ce joli site
Car bientôt il s'enfonce, va se flétrir
Étouffé par l'amas composite
de centaines, de milliers de poèmes qui en rang d'oignons
forment farandole inarrêtable, flot continu
dans la moiteurs des cerveaux naissant comme champignons
Massacrent leurs prédécesseurs en soldats inconnus
Il me vient cette idée atroce
Si Baudelaire revenait de sa fosse
Et venait poster ici "L'albatros"
Combien de commentaires lui feraient noce?
Et quel éditeur viendrait ici lui faire négoce?
Lui, ce géant, que dis-je ce colosse
Verrait le sort féroce, en perdrait son sacerdoce..
Et dame! Son bijou finirait comme les autres, dans un cul-de-basse-fosse!!