Première lettre
Remerciements
Madame laissez donc un être impatient
Vous présenter ses voeux et ces vers à la fois
Et vous remercier du séjour qui, ma foi,
S’il fut le dernier, fut bien le plus charmant.
Je suis bien maladroit pour vous dire merci
Je voudrais m’exprimer avec simplicité
Mais je ne sais parler et ma timidité
Quand je suis devant vous me donne du souci.
Deuxième lettre
Les quelques pauvres vers que je vous avais faits
Ne méritaient en rien si belle récompense
Vous me félicitez ! Grande est votre indulgence !
Mais comme leur auteur, ils sont bien imparfaits.
Si au premier abord ils ont l’air agréables
Et qu’à les lire même ils ne sonnent point faux,
Ils ne sont pas fameux et de bien peu s’en faut,
Comme pour leur auteur, qu’ ils ne soient détestables.
Je voudrais qu’ils soient beaux, dignes de vous Madame.
J’aimerais leur donner votre grâce infinie,
Mais, ici comme ailleurs, je ne suis un génie,
Et ne sais exprimer ce que ressent mon âme.
Mais vous êtes trop bonne et me félicitez
Pour ces humbles essais, pour ces petites choses.
Votre remerciement me rend si fier que j’ose,
Risquant d’être importun, ici récidiver.
Me pardonnerez vous une telle impudence ?
N’allez vous pas juger avec sévérité
Mon audace trop grande et ma témérité
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Je m’en vais de ce pas préparer ma défense.
Troisième lettre
Mon audace Madame a été bien punie
Dans un autre billet, j’en rougis quand j’y pense,
Avec la fatuité dont mon âme est munie,
N’ai-je point prétendu présenter ma défense ?
Las je n’ai rien trouvé ! Pourtant j’ai médité !
Me piquerai-je encor d’être biologiste ?
Mais non ! Je ne peux plus croire à l’hérédité !
Car où sont ils en moi les gênes du légiste ?
Ah si j’avais l’esprit qui brille en vos regards,
Je ne connaîtrais pas cet échec déplorable
Qui me laisse abattu, me donne l’air hagard,
Mandant votre pardon d’une voix lamentable.
Ne me répondez pas en vers car sur ma vie
Vos vers ne souffriraient pas de comparaison
Et de faire aussi bien je sècherais d’envie,
En relisant les miens je perdrais la raison.
Le ciel distribuant ses bienfaits au hasard,
Madame, vous dota d’un esprit adorable
Dont le sort m’a privé ! Que ne suis je un Ronsard ?
Lors je vous chanterais de façon mémorable.
Suis-je sot de trembler, implorant mon pardon ?
Je sais votre bonté car je connais votre âme.
Nul besoin de Ronsard pour que votre renom
S’étende jusqu’ici plus vite qu’une flamme.
Certes si celle-là qui est toute ma vie
N’avait pris pour toujours et mon coeur et ma foi,
La vue de vos beautés m’aurait l’âme ravie
J’aurais passé mon temps à vivre sous vos lois.
Puisque mon coeur déjà est comblé par l’Amour,
Madame, pardonnez qu’il ne vous aime point,
Mais souffrez cependant qu’on vous fasse la cour
Qu’à rester votre ami on mette tous les soins.
adn