Dans mes instants perdus de grande solitude,
Où les heures sont pour moi un sinistre fardeau,
Je songe aux jours d'antan par habitude,
Et naissent les souvenirs et s'en viennent les mots.
Que le temps a coulé dessous les ponts de Seine,
De mes rêves d'enfant à mes soucis présents,
De mes riches idées à cette morne plaine,
Où rode mon esprit dans un désert absent.
Je te revois encore ma douce prisonnière,
Tes cheveux blonds filant sur tes épaules nues,
Tu m'enseignas l'amour et ses joies singulières,
Le feu de tes baisers qu'est-il donc devenu ?
Nous empruntions tous deux les allées buissonnières,
Le vent dans nos cheveux pour unique chanson,
Tu me prenais la main, sans fard, sans manière,
Et nous cédions aux lois de maître Cupidon.
Je reviens quelques fois dans le bois solitaire,
Cherchant dans le passé la trace de nos pas,
Mais la mousse a poussé sur notre humble litière,
Et les oiseaux du ciel ne s'en souviennent pas.