Je ne laisserai pas, sur la grève éclatante,
La trace de mon pas accablé de chagrin.
Je ne chercherai pas, dans les eaux transparentes,
Le muet frémissement du monde sous–marin.
Je laisse au madrépore, et aux algues gracieuses
Mollement agitées par les tièdes courants,
La mission de veiller vos dépouilles précieuses
Et de puiser leur vie dans vos restes gisants.
C’est au fond de mon cœur, pour un autre séjour,
Que votre âme chérie a fixé sa demeure.
Ma pensée vous y trouve, et la nuit, et le jour,
Et vous y resterez jusqu’à ma dernière heure.
Mais de quel crime odieux payer si grande peine ?
Vous ai je assez aimés ? Vous ai je dit souvent ?
Mille questionnements m’assaillent en antienne…
Pourquoi vous ? Pourquoi moi ? Et pourquoi maintenant ?
Je n’ai plus que mon cri à lancer jusqu’aux nues.
Et mes pleurs pour couvrir les pages restées vides
Du livre de vos vies trop tôt interrompues,
Éteintes à jamais au fond des flots sans rides.
Je me tourne à présent vers toi, ho notre Père,
Toi qui m’as tant donné, et qui me reprend tant !
Que ta grâce infinie éclaire le mystère
Qui me broie aujourd’hui d’un malheur écrasant.
Sujet: La mer de pleurs et de sang. 
