Les nuages s'en vont, les nuages s'en viennent,
Sous le dais tourmenté d'un éternel été,
Et le vent fatigné de buriner les vagues,
Rêvasse mollement sous les frangipaniers.
Les pirogues s'en vont, les pirogues reviennent,
De la passe troublée au lagon immobile,
Elles glissent sur les eaux comme images païennes,
Sous le regard glacé de leurs dieux indociles.
Et les années s'en vont, et les années s'en viennent,
Pareilles aux mille années en ces lieux écoulées,
Une fumée s'élève en volutes aériennes,
De cent feux scintillant au fond de la vallée.
Un beau vieillard conte une légende ancienne,
A des marmots rieurs, turbulents et blasés,
Les autres vieux se taisent, marmonnent et se souviennent,
Des fêtes d'autrefois sur les grands marae,
Des chiens jaunes aboient se disputant l'aubaine,
D'une maigre pitance aux mannes abandonnée,
Des hommes fument, des femmes vont et viennent,
Un soleil rouge s'abîme derrière les noirs rochers.
Le silence s'installe sur cette île lointaine,
Pour toujours, à jamais, pour son éternité.
Shangaan